En France, si vous vivez à la campagne ou en bordure de ville rurale, votre maison est peut-être proche de champs, de vignes, ou de cultures céréalières ou fruitières… À quelle fréquence sont-ils traités ? Vous pourrez vous faire une idée en consultant la carte interactive sur l’utilisation des pesticides en France, mise au point par l’association Solagro.
Cette carte colore chaque commune selon son indice de fréquence de traitements phytosanitaires (IFT) : du vert foncé pour celles qui ont un indice nul, au rouge foncé pour les plus fréquemment traitées (indice allant de 10 à 18,5).
L’AFOC rappelle que selon les données 2021 des agences régionales de santé (ARS), 20 % des habitants de France métropolitaine, soit environ 12 millions d’individus, ont été confrontés, ponctuellement ou régulièrement, à de l’eau du robinet affichant des seuils trop élevés de pesticides et de métabolites (des molécules issues de la dégradation des pesticides dans l’environnement). Ce chiffre était de 5,9 % en 2020, selon le ministère de la santé (Le Monde, 22 septembre 2022).
L’AFOC dénonce régulièrement la présence de pesticides et de fongicides dans l’eau potable, les dépassements des seuils de qualité, ainsi que l’insuffisance des mesures de lutte contre ce fléau. Le dernier avatar en date fait suite au rapport du 5 avril de l’ANSES (agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation) qui révèle la présence du métabolite du chlorothalonil (pourtant interdit depuis 2019), parmi d’autres résidus de pesticides (157 au total), au-delà du seuil réglementaire, dans plus d’un prélèvement d’eau sur 2, effectué dans toute la France y compris l’outre-mer.
De là à se jeter sur les bouteilles d’eau en plastique... il y a un pas à ne pas franchir au gré des révélations qu’avaient faites l’association Agir pour l’environnement en 2022 selon lesquelles 7 bouteilles d’eau sur les 9 les plus vendues en France contiennent des microplastiques. Des résultats suite aux analyses faites en laboratoire qui pourraient être sous-estimés car, dans la vie réelle, l’exposition d’une bouteille aux UV (soleil), à la chaleur, ou sa réutilisation, est susceptible d’empirer l’apparition de microparticules de plastique.
Pesticides, microplastiques, contamination, va-t-on vers de nouveaux scandales de santé publique ?
Si la lutte contre la contamination doit continuer, l’AFOC milite également pour un étiquetage évaluant l’utilisation des pesticides au titre de l’affichage environnemental dont le déploiement est projeté cette année. Cette information pourrait être un levier efficace pour encourager la transition alimentaire d’une alimentation largement contaminée à une plus saine.
Car l’offre alimentaire n’est pas adaptée aux enjeux environnementaux et de santé et les consommateurs sont demandeurs de produits exempts de contamination et donc de moyens pour les identifier et les valoriser à l’instar du dispositif nutri-score en matière nutritionnel. Débattu depuis le Grenelle de l’environnement de 2007 auquel l’AFOC avait participé, l’affichage environnemental n’est toujours pas à ce jour une réalité juridique (il s’agit d’un dispositif volontaire encadré depuis 2014).
Si, après une expérimentation de 18 mois, le déploiement de l’affichage environnemental sur les produits alimentaires est prévu courant 2023 selon les instances publiques, rien ne dit malheureusement qu’il sera obligatoire à terme et qu’il portera sur les critères qui tiennent le plus à cœur aux consommateurs de produits alimentaires, à savoir l’utilisation de pesticides, le mode d'élevage et l’origine.
Au contraire, l’analyse des orientations présentées dans le rapport du Gouvernement au Parlement sur l’affichage alimentaire montre que l’affichage projeté n’est circonscrit qu’en matière environnemental et ne tend à informer les consommateurs que sur l’impact de leur consommation alimentaire sur les ressources, la biodiversité, et le climat.
Afin de rester dans le cadre des impacts « environnementaux », les orientations n’incluent pas à ce stade propositionnel les expositions liées à la présence de certaines molécules traces dans l’aliment. L’affichage d’un critère dédié à la santé environnementale pourrait donc ne pas s’accompagner d’une information directe sur les contaminants (notamment pesticides, métaux lourds, polluants industriels…) via les pollutions du milieu (air, eau, sol). Etonnant puisque l’alimentation est la première source de contamination par les pesticides !
En fait, avec l'affichage environnementale, on voit le tropisme habituel des décideurs publics : gommer les objets de dissensus et ne pas discriminer des pratiques agricoles dominantes, sacrifiant ainsi la santé des consommateurs au nom de l’ordre économique dominant.
On ne sera pas plus étonné que l’affichage des conditions sociales de production de l’offre alimentaire au moyen d’un signe visible ou accessible au consommateur au moment de l’acte d’achat ne fasse l’objet d’aucun projet réglementaire en vue.
Pour en savoir plus :
- PLATEFORME ADONIS - Première évaluation sur l’usage territorialisé des pesticides en France métropolitaine
- “Nous buvons du plastique”