La révélation récente de l’existence de pratiques trompeuses à grande échelle touchant de nombreuses marques françaises d’eau en bouteille est symptomatique des arbitrages qui peuvent être fais au détriment des consommateurs. Au moins un tiers desdites marques aurait commercialisé depuis de nombreuses années de l’eau en bouteille préalablement traitée en raison de contaminations sporadiques d’origine bactérienne ou chimique ; ces pratiques sont interdites sur les « eaux de source » ou « eaux minérales naturelles », au contraire de l’eau du robinet, rendue potable par traitement, mais qui coûte 100 fois moins cher.
Pour l’Afoc, il n’y a rien de condamnable à ce que les risques sanitaires soient pris en considération par les industriels vendeurs d’eau et que des actions correctives puissent être opérées.
Ce qui l’est plus en revanche, c’est le manque de transparence et d’information des acheteurs et des pouvoirs publics quant à ces pratiques, leur mode opératoire et leur conséquence sur le microbiome de l’eau et sur la santé humaine. Tout semble avoir été géré en catimini : procédés de filtration soustraits au regard des agents de contrôle, information tardive aux pouvoirs publics, rapport de l’IGAS de 2022 non rendu public. D’autres pratiques trompeuses sont pointées : mélange d’eau de sources différentes, adjonction d’eau du robinet, de gaz carbonique industriel dans les boissons pétillantes naturelles…
Le duo Etat-Industrie a tranché à la faveur de ce dernier sur fond de soutien à l’emploi et de protection des intérêts entrepreneuriaux ce qui n’est pas satisfaisant. Ces pratiques seraient connues depuis 2021 par les pouvoirs publics, et tolérées par elles afin de poursuivre l’exploitation des sites en autorisant les préfets à s’abstraire du seuil de filtration de l’eau minérale ou de source établi en 2001 par l’autorité de sécurité sanitaire.
Au moins devrait-on porter ce sujet au niveau européen pour avoir une norme harmonisée et, en attendant, indiquer sur les bouteilles l’existence d’un traitement de potabilisation de l’eau. Et pourquoi pas, en baisser le prix.